Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/167

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il dit ; le bord paraît. Les Heures, en ce lieu,
Ont préparé son lit… Il se relève dieu,
Détache la ceinture à la belle étrangère,
Et la vierge en ses bras devient épouse et mère.


XV[1]

LA JEUNE TARENTINE


Pleurez, doux alcyons ! ô vous, oiseaux sacrés !
Oiseaux chers à Téthys ! doux alcyons, pleurez !

Elle a vécu, Myrto, la jeune Tarentine !
Un vaisseau la portait aux bords de Camarine :
Là, l’hymen, les chansons, les flûtes, lentement
Devaient la reconduire au seuil de son amant.
Une clef vigilante a, pour cette journée,
Dans le cèdre enfermé sa robe d’hyménée,
Et l’or dont au festin ses bras seraient parés,
Et pour ses blonds cheveux les parfums préparés.
Mais, seule sur la proue, invoquant les étoiles,
Le vent impétueux qui soufflait dans ses voiles
L’enveloppe : étonnée et loin des matelots,
Elle crie, elle tombe, elle est au sein des flots.

Elle est au sein des flots, la jeune Tarentine !
Son beau corps a roulé sous la vague marine.

  1. Édition 1819. Ce morceau avait paru, par les soins de Marie-Joseph Chénier, dans le Mercure du 1er germinal an IX (22 mars 1801). M. G. de Chénier, dans son édition, a donné quelques rectifications dont nous tenons compte.