Page:Chénier - Œuvres en prose éd. Moland, 1879.djvu/113

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enthousiasme modéré, qu’elles-mêmes inspirent et alimentent.

Prévenons donc, il en est temps encore, tant et de si grands maux qui sont si près de nous. Nous marchons au bord des précipices ; soyons calmes, attentifs, déterminés ; donnons-nous le temps de saisir, de posséder profondément le sens et l’esprit des décrets, des institutions sur lesquelles notre avenir est fondé. Ce n’est point la méchanceté, c’est l’ignorance qui fait pécher le plus grand nombre. Les méchants ne sont jamais puissants que par l’ignorance de ceux qui les écoutent. Dans plusieurs endroits de la France, des magistrats, des pasteurs vraiment dignes de ce beau titre, se consacrent à expliquer à la classe la moins instruite les décrets de l’Assemblée nationale, à leur en montrer le but, à les lette traduire dans leur langage rustique, à leur en faciliter l’exécution. Dans ces cantons tout est paisible : ces hommes n’ont point ambitionné de s’élever sur un grand théâtre, et d’attirer sur eux tous les regards ; mais ils auront rendu à la vérité, à la constitution, au bonheur public, plus de services que plusieurs dont les noms sont vantés. Puisse leur exemple être fécond ! puisse-t-il réveiller par toute la France beaucoup de citoyens aussi respectables qui prennent sur eux un si noble, un si patriotique emploi qu’ils instruisent le peuple, qu’ils lui montrent son bonheur, sa liberté dans ses devoirs ; qu’ils lui rendent palpable et facile ce qu’il doit faire, et les moyens de le faire ; qu’ils le conduisent par la main dans les routes nouvelles qui lui sont tracées ; et bientôt, connaissant tous bien nos vrais intérêts,