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Qui dort ; et sur sa main, au murmure des eaux,
Laisse tomber son front couronné de roseaux.


Tu gémis sur l’Ida, mourante, échevelée,
Ô reine ! ô de Minos épouse désolée !
Heureuse si jamais, dans ses riches travaux,
Cérès n’eût pour le joug élevé des troupeaux !
Tu voles épier sous quelle yeuse obscure
Tranquille il ruminait son antique pâture,
Quel lit de fleurs reçut ses membres nonchalans,
Quelle onde a ranimé l’albâtre de ses flancs.
Ô nymphes, entourez, fermez, nymphes de Crète,
De ces vallons fermez, entourez la retraite.
Ô craignez que vers lui des vestiges épars
Ne viennent à guider ses pas et ses regards.
Insensée, à travers ronces, forêts, montagnes,
Elle court. Ô fureur ! dans les vertes campagnes,
Une belle génisse, à son superbe amant,
Adressait devant elle un doux mugissement.
La perfide mourra. Jupiter la demande.
Elle-même à son front attache la guirlande,
L’entraîne, et sur l’autel prenant le fer vengeur
« Sois belle maintenant, et plais à mon vainqueur. »
Elle frappe. Et sa haine à la flamme lustrale
Rit de voir palpiter le cœur de sa rivale.