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Qui nourrissent partout, sur tes nobles rivages,
Fleurs, moissons et vergers et bois et pâturages ;
Rampent au pied des murs d’opulentes cités
Sous les arches de pierre à grand bruit emportés.

Dirai-je ces travaux, source de l’abondance,
Ces ports où des deux mers l’active bienfaisance.
Amène les tributs du rivage lointain,
Que visite Phœbus le soir où le matin ?
Dirai-je ces canaux, ces montagnes percées,
De bassins en bassine ces ondes amassées,
Pour joindre au pied des monts l’une et l’autre Thétis ?
Et ces vastes, chemins en tous lieux, départis,
Où l’étranger, à l’aise achevant son voyage,
Pense aux noms des Trudaine et bénit leur ouvrage,

Ton peuple industrieux est né peur les combats.
Le glaive, le mousquet n’accablent point ses liras.
Il s’élance aux assauts, et son fer intrépide
Chassa l’impie Anglais, usurpateur avide.
Le ciel les fit humains, hospitaliers et bons ;
Amis des doux plaisirs, des festins, des chansons ;
Mais faibles opprimés, la tristesse inquiète
Glace ces chants joyeux sur leur bouche muette ;
Pour les jeux, pour la danse appesantit leurs pas,
Renverse devant eux les tables des repas,
Flétrit de longs soucis, empreinte douloureuse,
Et leur front et leur ame. Ô France trop heureuse,
Si tu voyais tes biens, si tu profitais mieux
Des dons que tu reçus de la bonté des cieux !