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Essaye avec les pleurs, les tendres doléances,
De faire à ses desseins de douces violences.
Sinon, tu vas l’aigrir ; tu te perds. La beauté,
Je te l’ai fait entendre, aime sa volonté.
Son cœur impatient, que la contrainte blesse,
Se dépite : il est dur de n’être pas maîtresse.
Prends-y garde : une fois le ramier envolé,
Dans sa cage confuse est en vain rappelé.
Cède, assieds-toi près d’elle ; et soumis avec grâce,
D’un ton un peu plus froid, sans aigreur ni menace,
Dis-lui que de tes vœux son plaisir est la loi.
Va, tu n’y perdras rien, repose-toi sur moi.
Complaisance a toujours la victoire propice.
Souvent de tes désirs l’utile sacrifice,
Comme un jeune rameau planté dans la saison,
Te rendra de doux fruits une longue moisson.


FLORE a pour les amans ses corbeilles fertiles ;
Et les fleurs, dans leurs jeux, ne sont pas inutiles.
Les fleurs vengent souvent un amant courroucé,
Qui feint sur un seul mot de paraître offensé.
Il poursuit son espiègle ; il la tient, il la presse ;
Et, fixant de ses flancs l’indocile souplesse,
D’un faisceau de bouquets en cachette apporté
Châtie, en badinant, sa coupable beauté ;
La fait taire et la gronde, et d’un maître sévère
Imite, avec amour, la plainte et la colère ;