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Mes pénates secrets couronnés de rameaux ;
D’où souvent les monts et les plaines
Vont dirigeant nies pas aux campagnes prochaines,
Sous de triples ceintres d’ormeaux.

Les chars, les royales merveilles,
Des gardes les nocturnes veilles,
Tout a fui ; des grandeurs tu n’es plus le séjour :
Mais le sommeil, la solitude,
Dieux jadis inconnus, et les arts, et l’étude
Composent aujourd’hui ta cour.

Ah ! malheureux ! à ma jeunesse
Une oisive et morne paresse
Ne laisse plus goûter les studieux loisirs.
Mon ame, d’ennui consumée,
S’endort dans les langueurs. Louange et renommée
N’inquiètent plus mes désirs.

L’abandon, l’obscurité, l’ombre,
Une paix taciturne et sombre,
Voilà tous mes souhaits. Cache mes tristes jours
Et nourris, s’il faut que je vive,
De mon pâle flambeau la clarté fugitive,
Aux douces chimères d’amours.

L’ame n’est point encor flétrie,
La vie encor n’est point tarie,
Quand un regard nous trouble et le cœur et la voix.
Qui cherche les pas d’une belle,
Qui peut ou s’égayer ou gémir auprès d’elle,
De ses jours peut porter le poids.