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Déjà tu penses voir, des bouts de l’Univers,
Sur la foi de ma lyre, au nom de ces pervers,
Frémir l’horreur publique ; et d’honneur et de gloire
Fleurir ma tombe et ta mémoire :
Comme autrefois tes Grecs accouraient à des jeux,
Quand l’amoureux fleuve d’Élide
Eut de traîtres punis vu triompher Alcide ;
Ou quand l’arc Pithien d’un reptile fougueux
Eut purgé les champs de Phocide.


ÉPODE I.

Vain espoir ! inutile soin !
Ramper est des humains l’ambition commune ;
C’est leur plaisir, c’est leur besoin.
Voir, fatigue leurs yeux ; juger, les importune ;
Ils laissent juger la fortune,
Qui fait juste celui qu’elle fait tout-puissant.
Ce n’est point la vertu, c’est la seule victoire
Qui donne et l’honneur et la gloire.
Teint du sang des vaincus tout glaive est innocent.

STROPHE II.

Que tant d’opprimés expirans
Aillent aux cieux réveiller le supplice ;
Que sur ces monstres dévorans
Son bras d’airain s’appesantisse ;
Qu’ils tombent ; à l’instant vois-tu leurs noms flétris,
Par leur peuple vénal leurs cadavres meurtris,