Mais, non, le dieu d’amour n’est point l’effroi des muses,
Elles cherchent ses pas, elles aiment ses ruses.
Le cœur qui n’aime rien a beau les implorer,
Leur troupe qui s’enfuit ne veut pas l’inspirer.
Qu’un amant les invoque, et sa voix les attire :
C’est ainsi que toujours elles montent ma lyre.
Si je chante les dieux ou les héros ; sondain
Ma langue balbutie et se travaille en vain.
Si je chante l’amour, ma chanson d’elle-même
S’écoule de ma bouche et vole a ce que j’aime.
L’INNOCENTE victime, au terrestre séjour,
N’a vu que le printemps qui lui donna jour.
Rien n’est resté de lui qu’un nom, un vain nuage ;
Rien n’est un souvenir ; un songe ; une invisible image.
Adieu, fragile enfant, échappé de nos bras ;
Adieu, dans la maison d’où l’on ne revient pas.
Nous ne te verrons plus ; quand de moisson couverte
La campagne d’été rend la ville déserté :
Dans l’enclos paternel nous ne te verrons plus,
De tes pieds, de tes mains, de tes flancs demi-nus,
Presser l’herbe et les fleurs dont les nymphes de Seine
Couronnent tous les ans les coteaux de Lucienne.
L’axe de l’humble char à tes jeux destiné,
Par de fidèles mains avec toi promené,