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Vinrent en bourdonnant sur ses lèvres vermeilles
S’asseoir et déposer ce miel doux et flatteur,
Qui coule avec sa voix et pénètre le cœur.
Reine aux yeux éclatans, la belle poésie
Lui sourit, et trempa sa bouche d’ambroisie,
Arma ses faibles mains des fertiles pinceaux
Qui font vivre la toile en magiques tableaux ;
Et mit dans ses regards ce feu, cette ame pure
Qui sait voir la beauté fille de la nature.
Une lyre aux sept voix lui faisait écouter
Les sons que Pausilippe est fier de répéter.
Et les douces vertus et les grâces décentes,
Les bras entrelacés autour d’elle dansantes,
Veillaient sur son sommeil ; "et surent la cacher
À Vénus, à l’Amour, qui brûlaient d’approcher ;
Et puis au lieu de lait, pour nourrir son enfance,
Mêlèrent la candeur, la gaîté, l’indulgence,
La bienveillance amie au sourire ingénu,
Et le talent modeste à lui seul inconnu ;
Et la sainte fierté que nul revers n’opprime,
La paix, la conscience ignorante du crime,
La simplicité chaste aux regards caressans,
Prés de qui les pervers deviendraient innocens.

Artiste, pour l’honneur de ton durable ouvrage,
Graves-y tous ces dons brillans sur son visage.
Graves, si tu le peux, son ame et ses discours,
Sa voix, lien puissant d’où dépendent nos jours ;
Les jours de ses amis ; troupe heureuse et fidèle,
Qui vivent tous pour elle, et qui mourraient pour elle.