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il veut offrir à sa famille quelques paroles de consolation. Des commissaires chargés d’une visite de papiers, jugèrent suspectes les personnes trouvées dans ce domicile, et les conduisirent toutes en prison. On rechercha l’origine de ce qu’on supposait un acte de quelque comité ; on voulut connaître de quel pouvoir il pouvait émaner, afin de le fléchir. Ces démarches furent inutiles. Quelqu’un offrit une somme considérable pour cautionner la liberté du prisonnier ; nulle autorité n’osa la lui rendre, et il était arrêté sans ordre ![1]

Cependant les ennemis de la faction anarchique étaient tous recherchés, et les arrêts du tribunal révolutionnaire couvraient Paris de deuil. L’unique sauve-garde des prisonniers était l’oubli où ils tombaient à la faveur de leur nombre. Ceux qui sont sortis à cette époque de la terrible épreuve des cachots se souviennent que c’est à ce moyen de salut que tendait la sollicitude de leurs amis. Il fallait se faire oublier ou périr. Marie-Joseph, alors insulté à la tribune, devenu l’objet de la haine particulière de Robespierre qui redoutait ses principes et enviait ses talens, n’aurait eu que le crédit de faire

  1. La maison où Chénier fut arrêté, a Passy, est devenue la propriété d’un homme qui aime les lettres et les cultive avec succès. Il a consacré, dans ses jardins, un souvenir à ce funeste événement.