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ÉLÉGIE VII


AUJOURD’HUI qu’au tombeau je suis prêt à descendre,
Mes amis ; dans vos mains je dépose ma cendre..
Je ne veux point, couvert d’un funèbre linceuil,
Que les pontifes saints autour de mon cercueil,
Appelés aux accens de l’airain lent et sombre,
De leur chant lamentable accompagnent mon ombre,
Et sous des murs sacrés aillent ensevelir
Ma vie, et ma dépouille, et tout mon souvenir.
Eh ! qui peut sans horreur à ses heures dernières
Se voir au loin périr dans des mémoires chères ?
L’espoir que des amis pleureront notre sort,
Charme l’instant suprême et console la mort.
Vous-mêmes choisirez à mes jeunes reliques
Quelque bord fréquenté des pénates rustiques,
Des regards d’un beau ciel doucement animé,
Des fleurs et de l’ombrage, et tout ce que j’aimai.
C’est là, près d’une eau pure, au coin d’un bois tranquille,
Qu’à mes mânes éteints je demande un asile
Afin que votre ami soit présent à vos yeux,
Afin qu’au voyageur amené dans ces lieux,
La pierre, par vos mains de ma fortune instruite,