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volontiers à la guerre. Chaque fois que le renégat passait avec sa barque, il jetait l’ancre dans une petite cale qui n’était pas à deux portées d’arquebuse du jardin où demeurait Zoraïde. Là, avec les jeunes Mores qui ramaient dans son bâtiment, il se mettait à dessein, tantôt à dire l’Azala, tantôt à essayer, comme pour rire, ce qu’il pensait bien faire tout de bon. Ainsi, il allait au jardin de Zoraïde demander des fruits, et le père lui en donnait sans le connaître. Il aurait bien voulu parler à Zoraïde, comme il me le confia depuis, pour lui dire que c’était lui qui devait, par mon ordre, la mener en pays chrétien, et qu’elle attendît patiemment, en toute confiance ; mais il ne put jamais y parvenir, parce que les femmes moresques ne se laissent voir d’aucun More, ni Turc, à moins que ce ne soit par ordre de leur père ou de leur mari. Quant aux captifs chrétiens, elles se laissent voir et entretenir par eux peut-être plus qu’il ne serait raisonnable. Pour moi, j’aurais été fâché qu’il lui eût