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cipes, dit Monipodio ; mais tout cela ne sont que de vieilles fleurs de coquelicots, si usées, si rebattues, qu’il n’y a pas un débutant qui ne les connaisse ; elles servent tout au plus contre un niais assez blanc pour se laisser rafler après minuit. Mais le temps marchera, et nous nous reverrons. En échafaudant sur ce fondement une demi-douzaine de leçons, j’espère en Dieu que vous deviendrez un habile ouvrier, et peut-être maître à la fin. — Tout cela sera pour servir votre grâce et messieurs nos confrères, » répondit Rinconète.

« Et vous, Cortadillo, reprit Monipodio, que savez-vous ? — Pour moi, répondit Cortadillo, je connais le tour qu’on appelle mets deux et tire cinq, et je sais sonder une poche avec beaucoup d’adresse et de ponctualité. — Savez-vous quelque chose de plus ? dit Monipodio. — Hélas ! non, pour mes grands péchés, répliqua Cortadillo. — Allons, ne vous affligez pas, mon enfant, repartit Monipodio, vous êtes arrivé à un port où vous ne vous noierez pas, et à une école d’où vous ne sortirez pas sans être bien pourvu de tout ce qu’il convient d’apprendre. Et quant au courage, comment cela vous va-t-il, enfants ? — Comment cela pourrait-il nous aller, répondit Rinconète, si ce n’est très-bien ? Du courage, nous en avons pour hasarder toute entreprise relative à notre art et à notre profession. — C’est fort bien, répliqua Monipodio ; mais je voudrais aussi que vous en eussiez pour souffrir, s’il en est besoin, une demi-douzaine d’angoisses, sans desserrer les lèvres, sans dire cette bouche est à moi. — Nous savons déjà, seigneur Monipodio, reprit Cortadillo, ce qu’ici veut dire an-