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PRÉFACE

Dans la seconde partie du livre, qui se termine au chap. lxvi, Cennino démontre d’abord le moyen de broyer les couleurs, leur nom, leur nature, notant leur plus ou moins de durée. Celles qu’il faut fuir, celles qui sont bonnes à employer sur panneau. sur mur à fresque à sec, et celles qui conviennent au papier. Son exactitude dans les plus petits détails est un sujet d’étonnement, car il va jusqu’à enseigner comment on unit une couleur avec l’autre pour en produire une troisième. Il apprend à faire les pinceaux de vair d’écureuil et de soie. IL n’y en avait pas d’autres alors. L’observateur sera émerveillé de voir comment, avec une si petite quantité de couleurs, ces maîtres ont pu faire des travaux qui excitent l’envie, soit par leur éclat, soit par leur conservation, après quatre siècles de durée. Si nous, qui croyons les avoir surpassés par nos découvertes en chimie, pouvions voir après un pareil espace de temps ce que seront devenues nos peintures modernes, nous penserions peut-être alors qu’il eût fallu tenir compte de cette antique simplicité. Pour ne parler que de la couleur noire, on voit qu’ils n’en avaient que de cinq espèces, tandis qu’aujourd’hui on en peut compter seize.

La troisième partie du livre commence par enseigner à travailler sur mur à fresque. Il parle des couleurs, de l’enduit, des mesures à prendre et de la manière de dessiner. De là il conduit à colorer selon la méthode enseignée par Giotto à Taddeo Gaddi, et par ce dernier à Agnolo son fils, maître de Cennino ; et ici Cennino remarque qu’Agnolo colorait mieux que son père. Je ne m’étendrai pas sur cette partie de l’ouvrage pour ne pas répéter les préceptes de l’auteur ; je dirai seulement qu’ils sont si clairement et si bien ordonnés dans cet endroit du livre, qu’ils doivent être d’une immense utilité aux artistes vivants qui n’étaient que trop dépourvus de renseignements précis et pratiques sur cette importante manière de peindre. C’est dans cette partie que l’auteur établit la règle des proportions du corps humain avec simplicité et clarté. C’est une chose singulière qu’en parlant du corps de la femme, il dit : « Je me tairai sur la proportion de la femme, car son corps