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SIXIÈME PARTIE

et mets-en dessus une feuille ou une demi-feuille, ayant humecté d’abord avec l’haleine et brunissant immédiatement avec la pierre. Si le hasard voulait que For se refusât sur ton panneau et que cela ne vînt pas selon ton désir, remets-en encore de la même manière. Si tu en pouvais supporter la dépense, ce serait une chose parfaite et qui te ferait honneur de doubler ainsi tout le champ. Quand tu verras qu’il est bien bruni, l’or sera aussi foncé dans les noirs que brillant dans les clairs.

CXXXIX.Quel or et de quelle grosseur il le faut pour brunir et appliquer sur mordants.

Sache que l’or que l’on emploie sur panneau devrait ne fournir pour un ducat que cent feuilles, tandis que l’on en tire cent quarante-cinq[1]. Cependant l’or sur les parties plates doit être plus fort. Aie soin, quand tu veux connaître l’or que tu achètes, de le prendre chez de bons batteurs d’or et de le regarder ; s’il est ondulé et triste comme serait une feuille de parchemin, tiens-le pour bon. Sur les corniches et les feuillages, on peut se servir d’or plus léger. Pour les frises et ornements faits au mordant, il doit être très-fin comme toile d’araignée.

  1. Cennino se plaint que d’un ducat ou sequin on tirait 145 feuilles d’or, au lieu de 100 pour celui qui servait à faire les pleins sur panneau. Vasari (Introd. alle tre arti, cap. 28.) dit que de son temps on en tirait mille de la valeur de six écus, environ trois ducats, compris la main d’œuvre. Selon le désir de Cennino, on n’aurait dû retirer de six écus qu’environ 300 feuilles, et selon l’usage dont il se plaint, on en aurait tiré 435 ; ce qui ne fait que la moitié de ce qui se faisait du temps de Vasari. Sans doute, cette plus grande épaisseur de la feuille d’or donne aux panneaux antiques cette apparence d’une lame d’or. Si notre auteur avait assigné la grandeur des feuilles, comme le Vasari, qui leur donne un huitième de bras par chaque côté, on aurait pu faire une estimation plus exacte et asseoir un jugement. (C. T.)