bien que l’on dût s’attendre à tout le contraire, car il était fils d’un paysan de Jesi. Il maudit son art et ceux qui le lui avaient enseigné, et jura que dorénavant il renoncerait aux grands ouvrages, et ne s’occuperait plus que de petites bo……rie, puisqu’on les payait si bien. Non moins indigné à mon tour, je lui dis que chaque oiseau avait son ramage, qu’il parlait comme on parle dans les tanières d’où il était sorti ; puis, je lui protestai que je me tirerais très-bien des coglionerie qu’il faisait, mais que lui ne réussirait jamais à faire mes bo……rie. Enfin, je le quittai furieux, en lui annonçant que bientôt je lui prouverais que je disais vrai. Les assistants lui donnèrent tort à haute voix, le tenant pour un vilain qu’il était, et moi, pour un galant homme, ainsi que je l’avais montré.
Le lendemain, j’allai remercier madonna Porzia ; et je lui dis que sa seigneurie, au lieu de faire rire le diable, lui avait fait renier Dieu de nouveau. Nous en rîmes tous les deux de bon cœur, et elle me confia plusieurs travaux aussi beaux que lucratifs.
Pendant ce temps, je cherchai, par l’entremise d’un élève de Raphaël d’Urbin, à obtenir que l’évêque de Salamanque me chargeât d’exécuter une de ces grandes aiguières dont on se sert pour l’ornement des crédences. Comme ce prélat désirait en avoir deux d’égale dimension, il en commanda une à Lucagnolo, et l’autre à moi. Le dessin de ces aiguières nous fut fourni par le peintre Giovanfrancesco.
J’abordai ce travail avec une ardeur merveilleuse. Un Milanais, que l’on appelait maestro Giovanpiero della Tacca, m’avait cédé un petit coin dans sa boutique. Je fis alors le compte de l’argent dont je pouvais avoir besoin pour mes affaires, et j’envoyai tout le reste à mon pauvre père. Au moment où on le lui remit à Florence, il se trouva par hasard avec un de ces enragés qui faisaient partie des