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LIVRE PREMIER



CHAPITRE II
(1515. — 1518.)

Rixe. — Exil. — Séjour à Sienne et à Bologne. — Retour à Florence. — Andrea Cellini et le musicien Pierino. — Prédiction. — Mort tragique. — Fuite de la maison paternelle. — Séjour à Pise. — Maestro Ulivieri della Chiostra. — Le Campo-Santo. — Les antiques. — Retour à Florence. — Maladie. — Encore la flûte.

Dans ce temps-là, mon frère, qui par sa bravoure et son audace devint un des meilleurs soldats de l’admirable Jean de Médicis, père du duc Cosme, avait quatorze ans environ. Moi, j’étais de deux ans plus âgé que lui. Un dimanche, vers la vingt-deuxième heure, il se trouvait entre la porte San-Gallo et la porte Pinti, et là il avait défié, l’épée à la main, un jeune homme d’une vingtaine d’années. Il le serrait avec tant de vigueur, que, même après l’avoir grièvement blessé, il semblait ne pas vouloir s’arrêter. Parmi les nombreux témoins du combat étaient plusieurs parents du blessé ; lorsqu’ils s’aperçurent que la chose tournait mal, ils s’armèrent de pierres dont l’une atteignit la tête de mon pauvre jeune frère et le renversa à terre comme mort. Je me rencontrais là par hasard, sans amis et sans armes. J’avais crié de toutes mes forces à mon frère de se retirer, qu’il en avait assez fait ; mais, dès que je le vis tomber, je saisis son épée, je me plaçai devant lui, et je fis face aux épées et aux pierres. Je ne le quittai point d’une semelle jusqu’au moment où quelques vaillants soldats arrivèrent de la porte San-Gallo et nous arrachèrent à ces furieux, en admirant que tant de valeur fût unie à une si grande jeunesse. Je portai mon frère demi-mort à