Page:Cazotte - Le Diable amoureux.djvu/252

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

En même, temps il donne ordre qu’on aille chercher ma voiture.

Me voilà hôte de Marcos, le fermier de monseigneur le duc, et nous entrons dans le salon préparé pour le repas de noce ; adossé au manoir principal, il occupe tout le fond de la cour : c’est une feuillée en arcades, ornée de festons de fleurs, d’où la vue, d’abord arrêtée par les deux petits bosquets, se perd agréablement dans la campagne, à travers l’intervalle qui forme l’avenue.

La table était servie. Luisia, la nouvelle mariée, est entre Marcos et moi : Biondetta est à côté de Marcos. Les pères et les mères, les autres parents sont vis-à-vis ; la jeunesse occupe les deux bouts.

La mariée baissait deux grands yeux noirs qui n’étaient pas faits pour regarder en dessous ; tout ce qu’on lui disait, et même les choses indifférentes, la faisaient sourire et rougir.

La gravité préside au commencement du repas : c’est le caractère de la nation ; mais à mesure que les outres disposées autour de la table se désenflent, les physionomies deviennent moins sérieuses.

On commençait à s’animer, quand tout à coup les poëtes improvisateurs de la contrée paraissent autour de la table. Ce sont des aveugles qui chantent