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de quitter la cour : Quand j’aurai de la peine aux Carmélites, je me souviendrai de ce que ces gens-là m’ont fait souffrir (en parlant du roi et de madame de Montespan), ce qui marque que sa patience n’étoit pas tant un effet de son insensibilité, qu’une épreuve peut-être mal entendue et téméraire : je laisse aux dévots à en juger. Il est certain que le style de la dévotion convenait mieux à son esprit que celui de la cour, puisqu’elle a paru en avoir beaucoup de ce genre. Je l’ai vue dans les dernières années de sa vie, et je l’ai entendue, avec un son de voix qui alloit jusqu’au cœur, dire des choses admirables de son état, et du bonheur dont elle jouissoit déjà malgré l’austérité de sa pénitence [1].

Je me souviens d’avoir ouï raconter que feu M. l’évêque de Meaux, Bossuet, lui ayant annoncé la mort de M. le comte de Vermandois, son fils[2], elle avoit, par un mouvement naturel, répandu beaucoup de larmes ; mais que, revenant tout à coup à elle,

  1. C’est alors qu’elle écrivit les Réflexions sur la Miséricorde de Dieu, qui furent publiées en 1680, sans nom d’auteur. M. Romain-Cornut a donné une rédaction nouvelle de cet opuscule d’après un manuscrit de la Bibliothèque du Louvre, sous ce titre : Les Confessions de mademoiselle de La Vallière, écrites par elle-même et corrigées par Bossuet, avec un commentaire historique et littéraire. (Didier, édit., 1854, in-12.)
  2. Mademoiselle de La Vallière avait eu quatre enfants de Louis XIV ; deux seulement vécurent ; Marie Anne de Bourbon, dite mademoiselle de Blois, née en 1666 (il en sera question plus loin dans les Souvenirs), et Louis de Bourbon, comte de Vermandois, né en 1667. Le comte de Vermandois, légitimé en 1669, et nommé la même année amiral de France, mourut à l’âge de 16 ans au siège de Courtray, le 18 novembre 1683. « Il tomba