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j’ai vue de près, et ils m’ont priée de les mettre par écrit. Je leur obéis ; sûre de leur fidélité et de leur amitié, je ne puis craindre leur imprudence, et je m’expose volontiers à leur critique.

Je commencerai ces Souvenirs par madame de Maintenon, dont l’esprit, le mérite et les bontés qu’elle eut pour moi, ne s’effaceront jamais de ma mémoire. Mais ni la prévention que donne l’éducation, ni les mouvemens de ma reconnoissance, ne me feront rien dire de contraire à la vérité.

Madame de Maintenon étoit petite-fille de Théodore-Agrippa d’Aubigné, élevé auprès de Henri IV, dans la maison de Jeanne d’Albret, reine de Navarre, et connu surtout par ses écrits et son zèle pour la religion protestante, mais plus recommandable encore par une sincérité dont il parle lui-même dans un manuscrit que j’ai vu de sa main, et dans lequel il dit que sa rude probité le rendoit peu propre auprès des grands.

Il eut l’honneur de suivre Henri IV dans toutes les guerres qu’il eut à soutenir ; et se retira, après la conversion de ce prince, dans sa petite maison de Mursay, près de Niort en Poitou[1].

Le zèle d’Agrippa d’Aubigné pour sa religion, et son attachement pour son maître, lui firent tenir un discours après l’assassinat de Jean Châtel, qui lui fit beaucoup d’honneur dans le parti des huguenots.

  1. Il en fait la description dans le Baron de Fœneste (Liv. I, chap. v), et c’est de lui-même qu’il parle sous le nom d’Enay.