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Mademoiselle de Jarnac, laide et malsaine, ne tiendra pas beaucoup de place dans mes Souvenirs. Elle vécut peu et tristement ; elle avoit, disoit-on, un beau teint pour éclairer sa laideur.

Mademoiselle de Lewestein, depuis madame de Dangeau, entra fille d’honneur à la place de mademoiselle de Laval ; et comme j’aurai souvent occasion de parler d’elle, il est bon de donner ici une légère idée de sa personne et de son caractère. On sait qu’elle est de la maison Palatine. Un de ses ancêtres, pour n’avoir épousé qu’une simple demoiselle, perdit son rang[1], et sa postérité n’a plus été regardée comme des princes souverains ; mais messieurs de Lewestein ont toujours porté le nom et les armes de la maison Palatine, et ont été depuis comtes de l’empire, et alliés aux plus grandes maisons de l’Allemagne.

M. le cardinal de Furstemberg[2], après une longue et dure prison qu’il s’attira par son attachement à la France, vint s’y établir, et amena à la cour made-

  1. *Il ne perdit point son rang de prince ; mais ses enfants n’en purent jouir, faute d’un diplôme de l’Empereur.
  2. Guillaume Egon de Furstemberg (1629-1704), évêque de Strasbourg et cardinal, avait été conseiller de l’électeur de Cologne, Maximilien-Henri, et s’était montré partisan de la France. L’empereur irrité de ce dévouement contraire à ses intérêts le fit enlever, puis incarcérer successivement à Vienne et à Neustadt, et ne le délivra qu’après la paix de Nimègue. Furstemberg fut élu, en 1688, coadjuteur de l’archevêque de Cologne, mais comme son élection ne fut pas ratifiée par le Saint-Siège, Louis XIV lui donna en compensation l’abbaye de Saint-Germain des Prés, où il vint terminer ses jours.