belle taille, un visage agréable, et dansoit parfaitement bien. On prétend qu’elle plut au Roi ; je ne sais ce qui en est[1]. Il la maria avec M. de Roquelaure, et le fit duc à brevet, comme l’avoit été monsieur son père.
Les premières vues de M. de Roquelaure n’avoient pas été pour mademoiselle de Laval. La faveur de madame de Maintenon qu’on voyoit augmenter chaque jour, le fit penser à moi ; mais il me demanda inutilement : madame de Maintenon répondit que j’étois un enfant qu’elle ne songeroit pas si tôt à établir, et qu’il feroit bien d’épouser mademoiselle de Laval. M. de Roquelaure, surpris de ce discours, ne put s’empêcher de dire : Pourrois-je l’épouser avec les bruits qui courent ? qui m’assurera qu’ils sont sans fondement ! Moi, reprit madame de Maintenon, je vois les choses de près, et je n’ai pas d’intérêt à vous tromper. Il la crut, le mariage se fit, et le public, moins crédule, tint plusieurs discours, et en fit tenir à M. de Roquelaure de peu convenables. On fit aussi des chansons, comme on ne manque jamais d’en faire à Paris sur tous les événemens[2].
- ↑ La princesse Palatine dit de même : « On a soupçonné la duchesse de Roquelaure d’avoir fait la conquête du roi ; la médisance a beaucoup parlé de cette intrigue, mais je n’y ai pas mis le nez. » Saint-Simon, d’ordinaire peu circonspect, se borne à constater que Louis XIV était fort épris d’elle.
- ↑ Les recueils manuscrits nous ont conservé quelques-unes des chansons auxquelles madame de Caylus fait allusion :
Nous portons des fontanges,
C’est la mode entre nous ;
Ne trouvez pas étrange
Si Roquelaure, aussi belle qu’un ange,
En donne à son époux.