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nommé successivement chef d’escadre et lieutenant général des armées navales.

Mademoiselle de Mursay resta auprès de madame de Maintenon, qui avait tenu à se charger de son éducation et s’en acquitta avec un zèle au-dessus de tout éloge. Aussi est-on en droit de s’étonner de l’union singulière qu’elle fit contracter à cette nièce qui était de sa part l’objet d’une constante sollicitude. Après avoir refusé sa main à M. de Roquelaure et au duc de Boufflers, elle la maria à peine âgée de treize ans, en 1686, à Jean-Anne de Tubières, de Grimoard, de Pestels et de Lévis, comte de Caylus, un ivrogne endurci qui n’eut jamais d’autre passion que celle de la dive bouteille. Ce mariage disproportionné peut s’expliquer sans doute par cette modestie outrée dont madame de Maintenon voulait parfois donner l’exemple mais il est probable que la tante avait surtout cédé au désir de retenir son aimable nièce auprès d’elle, en lui faisant épouser un homme que l’on devait éloigner le plus possible de sa femme et de la cour. Quoi qu’il en soit, madame de Caylus ne garda point rancune à madame de Maintenon du mauvais office qu’elle lui avait rendu en cette circonstance et cela, sans doute, pour deux raisons la première c’est qu’elle ne fut jamais importunée par son mari, la seconde c’est qu’elle n’hésita point à reporter sur un courtisan des plus aimables l’amour dont son époux n’était pas digne.

Quelques années s’étaient déjà écoulées depuis