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PROSES NON RECUEILLIES 107. Un spectacle Vous voir pleurer ainsi… Non je ne le veux pas, non, cela me déchire ! -Eh que dirais-tu donc si tu me voyais rire ! LE ROI S’AMUSE Il y a des jours d’épreuves. Je crus celui-ci fini, car le soleil était couché. Mon cœur tombait d’un incroyable abattement ; je marchais sans voir ; je priais encore. Si ma chère famille n’était pas là si heureuse, disais-je, que je serais à plaindre ce soir ! Je ne peux me soutenir. Pourtant la bonté fait du bien ; et il est bon ce peuple, car il est reconnaissant : il proteste pour la dépouille même de ceux qu’il vénère. C’est doux à penser ; mais j’ai une amie de moins, qui m’a protégée enfant… Et des larmes qui ne coulaient plus roulaient sous mon front. Il fallait passer devant le théâtre qui venait de perdre une de ses gloires. Je crus de loin voir un crêpe étendu sur lui ; c’est qu’il était sur mon âme ! Un rassemblement tumultueux barrait l’entrée de ce lieu de plaisir ; des femmes élégantes en sortaient précipitemment avec un air d’agitation et de frayeur ; des hommes armés circulaient à l’entour : d’autres en sortaient, pâles, sans chapeau, les vêtements en désordre et déchirés, et des hurlements, des éclats de rire, s’élevaient par intervalle de cette espèce de marée aux flots menaçans. Un effroyable éclat de vitres et de portes brisées porta une joie sauvage au fond de cette foule agitée en tous sens. Des voix crièrent : A nous la victoire Le rideau est baissé, le lustre est éteint, tous les bancs sont en pièces… Bravo, les siffleurs ! A bas le public paisible ! en prison les défenseurs du comédien ! Et les vitres de voler en l’air ; et la joie, et les rires, et les hurlements de faire frissonner tout le monde aux fenêtres. Je voulais savoir… c’était pourtant bien triste ; mais on veut savoir quand le cœur éclate d’incertitude et d’effroi. «

On disait dans un groupe : » C’est une exécution d’acteur. Horrible amusement criaient des hommes indignés. Un plus calme répondait : Que voulez-vous ! c’est comme cela tous les ans ; ils n’ont rien pour se distraire non plus, ces pauvres jeunes gens : quelques parties de chevaux, et le renvoi de quelques comédiens ; la police ferme les yeux, c’est juste.