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aussi violents. Je vous ai dit que Jaurès, en principe, était partisan de l’alliance avec la Russie. Il ne voulait pas l’isolement de la France — mais pour la première fois — lui qui était au fond très prudent, malgré son enthousiasme, sa fougue oratoire, il pesait toujours ses paroles, surtout dans des circonstances aussi graves — il a dit textuellement : « Si on fait appel au traité secret avec la Russie, nous en ferons appel au traité public avec l’humanité ». Voilà le mot textuel. On peut trouver ces paroles dans Le Peuple de l’époque, organe du Parti socialiste belge. Il avait donc compris que c’est cette alliance qui nous mènerait à la guerre. C’est le jeu de l’alliance qui menaçait la paix.

Le surlendemain, le 31, il a passé toute son après-midi à la Chambre. J’y étais également pendant toute l’après-midi. Il répétait devant les journalistes, dans la salle des Pas-Perdus, les paroles suivantes : « Comment, pendant 44 ans, nous n’avons pas fait la guerre pour la France, pour l’Alsace-Lorraine, et nous allons maintenant faire la guerre pour la Serbie, pour la Russie ». En sortant de cette salle des Pas-Perdus, en entrant dans la salle à côté, la salle dite des Quatre-Colonnes, Jaurès fut entouré de journalistes, d’hommes politiques, et il disait : « Comment ! nous allons déchaîner un désastre mondial pour Iswolsky — ici un qualificatif que je ne me rappelle pas exactement — qui est furieux de n’avoir pas touché d’Ærenthal son pourboire de 40 millions pour l’affaire de Bosnie-Herzégovine.

Je me rappelle encore ce fait, qu’il serait intéressant d’étudier de plus près : A ce même moment, quelqu’un a raconté, je ne sais pas si c’est Jaurès ou