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créatures devait te conduire à moi, pour y contempler la beauté de mes mystères ; et c’est en bas que tu regardes ; tu n’as d’yeux que pour la boue, et tu n’en retires pour toi que la mort !

L’oreille aussi prend plaisir aux choses déshonnêtes, elle accueille les propos sur autrui pour le pouvoir juger Que ne s’emploie-t-elle à écouter ma parole et à s’informer des besoins du prochain ! C’est pour cela que je l’ai faite.

La langue a été donnée à l’homme pour annoncer ma parole et faire l’aveu de ses fautes, comme aussi pour coopérer au salut des âmes. Il l’emploie, au contraire, à blasphémer contre moi, son Créateur, et à la perte du prochain. N’est-ce pas elle, en effet, qui met en pièces sa réputation, qui murmure contre lui, qui calomnie ses œuvres, rabaissant les bonnes et exaltant les mauvaises. Jurements, faux témoignages, paroles lascives, dangereuses pour soi-même et pour les autres, voilà ses méfaits. Et n’est-ce pas elle encore, qui lance ces mots d’injures qui traversent le cœur du prochain comme un poignard et provoquent sa colère ? Que de maux, que d’homicides, que d’impuretés, que de haines, que de vengeances, que de pertes de temps, sont imputables à la langue !

L’odorat ne pèche-t-il pas, lui aussi, par le plaisir désordonné qu’il recherche dans ses propres sensations. Et le goût, avec son avidité insatiable, avec ses appétits déréglés, toujours en quête de mets variés et sans cesse renouvelés, comme s’il n’avait pour objectif que de remplir le ventre ! Elle