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Il n’a donc pas lu cette doctrine que lui a donnée le Verbe ma Vérité, ce malheureux qui, par défiance, retient son cœur et n’ouvre qu’à demi la main qui doit être secourable au prochain ! Il va devenir ainsi insupportable à soi-même. Cette confiance qu’il a mise en lui, avec cette défiance vis-à-vis de moi, est la source de tous les maux. C’est ainsi qu’il se fait juge de la volonté des hommes, sans remarquer que ce jugement n’est pas de sa compétence, et n’appartient qu’à moi seul. Quant à ma volonté, il ne la comprend pas et la juge fort mal à moins qu’elle lui ménage quelque prospérité, quelque satisfaction ou quelque plaisir du monde. S’il ne voit rien venir de ce côté, comme c’est là qu’il a placé tout son cœur et tout son espoir, il lui semble que ma providence ne fait rien pour lui, et qu’il ne reçoit rien de ma bonté ; tout lui manque, croit-il, et tout l’abandonne. Aveuglé qu’il est par sa propre passion, il ne voit pas le trésor qu’il y a dans cette détresse, il ne perçoit pas le fruit de la véritable patience. C’est la mort qu’il en retire, et il a dès cette vie, un avant-goût de l’enfer.

Et moi cependant, dans ma bonté, je ne laisse, malgré tout, de pourvoir à ses besoins. Je commande à la terre de donner ses fruits au pécheur comme au juste ; sur son champ je fais luire mon soleil et je répands ma rosée, comme sur le champ du juste. Souvent même c’est le pécheur qui recevra avec plus d’abondance.

Ainsi en dispose ma bonté, pour verser plus largement les richesses spirituelles dans l’âme du