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n’aime personne, sinon par intérêt. Ce vice procède de l’orgueil, et l’orgueil à son tour s’alimente par l’avarice, qui satisfait au besoin de réputation personnelle. Ces deux vices se prêtent ainsi un mutuel appui, et l’on se précipite de mal en pis, par le fait de ce misérable orgueil avide de paraître.

Il est un feu qui toujours répand une vanité de gloire et de vanité de cœur, où l’on se glorifie de ce qui n’est pas à soi. Il est en même temps une souche qui produit plusieurs rameaux, mais dont le principal est le désir d’être compté pour beaucoup, qui pousse à vouoir être plus grand que les autres. Sous l’empire de cette ambition, le cœur cesse d’être sincère et généreux, pour devenir hypocrite et menteur. La langue exprime une chose, quand le cœur en enferme une autre : elle dissimule la vérité, et profère le mensonge, suivant que l’intérêt le demande. Ce vice enfante l’envie, ver intérieur qui sans cesse ronge le cœur, et ne le laisse jouir ni de son propre bien ni de celui d’autrui. Comment, en une pareille bassesse, ces méchants pourraient-ils distraire une part de leur fortune pour le besoin des pauvres, eux qui dérobent celle des autres ? Comment retireraient-ils leur âme grossière de cette vilenie, quand ce sont eux-mêmes qui l’y plongent ! Parfois même, ils deviennent si inhumains qu’ils ne regardent même pas leurs fils ni leurs parents, quand, encore, ils ne les réduisent pas à la misère.

Néanmoins ma miséricorde les supporte, je ne commande pas à la terre de les engloutir ! J’en agis ainsi pour qu’ils reconnaissent leurs fautes.