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AVANT-PROPOS

acceptées dans mes travaux antérieurs, soit sur la foi d’autrui, soit en raison de mon ignorance partielle d’une matière dont d’abord l’étendue et la complexité m’échappaient.

L’introduction était imprimée dans la Revue des Langues romanes avant que j’aie pu connaître les remarquables travaux de M. Bédier sur les Chansons de Geste. J’en aurais sûrement profité, tout en ne m’y ralliant point sans quelques réserves, car en cet ordre d’étude aucune solution ne me paraît exclure absolument sa contraire. Mais l’on est heureux de voir un beau talent renouveler une matière si précieuse, dont tout semblait avoir été dit.

Les encouragements de deux hommes illustres, notre si regretté Gaston Paris et M. Pio Rajna, l’éminent philologue italien, m’ont soutenu dans une tâche ingrate. Tout en dernier lieu, M. Cowley, bibliothécaire à l’Université d’Oxford, m’a aidé à me faire une idée moins incomplète de manuscrits que j’avais d’abord renoncé à classer.

Ce serait pour moi une grande récompense, si la première édition française de celle de nos épopées qui fut la plus populaire, rappelait, dans notre pays, l’attention sur les aventures si dramatiques, si émouvantes des fils du vieux duc Aymes. On connaît surtout Renaud et ses frères par les brillantes transpositions italiennes. Nul n’admire plus que moi la finesse de Pulci, les inventions merveilleuses de Boiardo, le génie et l’art incomparable d’Arioste, mais entre notre épopée et le roman chevaleresque italien, il est toute une littérature populaire où la matière de France a subi une première élaboration au détriment de plusieurs de ses caractères éminents. Pour ne citer qu’un exemple, le Renaud italien, épris de toutes les belles dames, infidèle à Clarisse, me paraît dériver d’œuvres telles, que l’Anchroja, qui s’inspire évidemment du Maugis d’Aigremont plus que des Fils Aymon. Il faut donc revenir aux poèmes primitifs, si éloignés qu’on les suppose de notre tempérament moderne. Lorsque Ginguené, étudiant le premier les antécédents de l’épopée italienne, cite quelques passages où Tasse a imité la Spagna, il en vient à parler de ces conseils, que Charlemagne assemble souvent, des combats, des ambassades, et conclut : « L’auteur ne peut