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les quatre fils aymon

n’étonnent point quand on a présent à la pensée le mode de constitution de l’histoire des Fils Aymon.

Une autre hypothèse consisterait à admettre que des récits antérieurs avaient confondu les noms de Gondovald et de Ragnovald. Ce dernier se trouvait à Toulouse quand le prétendant s’y arrêta et put être compté au nombre de ses partisans. L’intérêt de cette hypothèse dépend de l’importance que l’on est disposé à reconnaître à l’histoire de Gondovald dans la constitution de la légende des Fils Aymon. La célébrité de Reynart, de l’astucieux et malhonnête personnage qui cause tant de soucis au Roi Noble, aurait pu être pour quelque chose dans la préférence accordée au nom de Ragnovald sur celui de Gondovald[1].

L’on trouvera sûrement d’autres explications plus ingénieuses ; je souhaite qu’elles soient plus solides. À vrai dire, si l’on voyait dans Renaud un personnage fictif, formé d’éléments traditionnels que la société féodale admirait encore au XIIe siècle, l’on jugerait naturel que les trouvères aient renoncé à lui choisir un nom parmi ceux que l’épopée avait consacrés, et qu’ils aient désigné le héros de leur invention par un nom nouveau comme lui.

Pourquoi les Fils Aymon sont-ils au nombre de quatre ? Ce chiffre est celui des fils de Clotaire qui ont régné. Si l’on regarde à la descendance de Pepin, l’on voit que de Plectrude il avait eu deux fils, Drogo et Grimoald, qui moururent avant lui. Drogo eut lui-même quatre fils, Arnulf, Hugo, Arnold Drogo. On a pu croire qu’en s’emparant du pouvoir, Charles, fils d’Alpaïde, faisait tort à ses neveux, d’autant plus que Pepin avait désigné pour lui succéder dans sa charge, Theudald, fils de son second fils Grimoald[2].

  1. Sur Ragnovaldus, Reginovaldus, Regnovaldus, v. Greg. Toron.VI, 12 ; VII, 10.
  2. L’aîné des fils de Drogo Ier, Hugo, fut fidèle à Charles qui lui donna les évêchés de Paris, Rouen, Bayeux, l’abbaye de Saint-Wandrille. Mais Arnold et Drogo sont indiqués comme ayant été emprisonnés en 723 et étant morts la même année. V. Ann. Mosell., ad. a. 723 : duo filii Drogoni ligati, Arnoldus et unus mortuus. Cf. Ann. Lauresh. Petav. ad a. 723. Les Ann. Alamannici ont Druogo au lieu d’Arnold. Il n’est plus fait mention d’Arnulf. V. Breysig, p. 45-46. M. Jordan a également regardé à ces passages des Annalistes (p. 23), mais il ne considère que trois frères. L’on savait que Drogo avait eu quatre fils. C’est là surtout l’intérêt du rapprochement