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TRAITÉ DES HÉRÉTIQUES

innocent, que tu as travaillé à le retenir : certainement nous n’eussions point vu tant de brûlements, ni tant de glaives sanglants de sang innocent, et ne mangerions pas maintenant les poissons nourris et engraissés du sang de ceux là, pour lesquels Christ a épandu le sien.

Ô Princes, ouvrez les yeux, et ne vilipendez plus ainsi le sang humain, pour l’épandre si facilement, principalement en cette cause de la religion. Car celui qui fera jugement sans miséricorde, la même mesure lui sera remesurée.

Au reste, pource qu’en ces sentences ici est démontré, non pas que c’est d’hérétique, (ce que toutefois doit être avant toutes autres choses connu) mais comment on doit traiter celui qui est hérétique, je exposerai en bref par la parole de Dieu, que c’est d’un hérétique, afin qu’on puisse mieux voir de quelle sorte de gens il est ici traité. Car je n’estime pas tous ceux-là être hérétiques, qui sont appelés hérétiques. Et voire que ce nom d’hérétique du temps de saint Paul n’était point tellement infâme, que les hérétiques fussent réputés pires que les avaricieux, ou hypocrites, plaisanteurs, ou flatteurs. Jà soit qu’aujourd’hui pour avarice, ou hypocrisie, pour plaisanterie, ou flatterie (desquels on peut facilement juger) nul n’est occi, mais pour hérésie, (de laquelle on ne peut pas si facilement juger) tant de gens sont mis à mort. Certainement, après avoir souvent cherché que c’est d’un hérétique, je n’en trouve autre chose, sinon que nous estimons hérétiques tous ceux qui ne s’accordent avec nous en notre opinion. Laquelle