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PHILOSOPHIE

sera. En effet, ce que M. Hamon fait aujourd’hui, est aussi bon comme conception, comme dessin, comme couleur, que ce qu’il faisait autrefois. L’Enseignement mutuel, Laboutique à quatre sous, valent, ou peu s’en faut. Ma sœur n’y est pas et La poupée cassée. Mais la mode a tourné, et)a critique, qui ne sait jamais bien ce qu’elle veut, se met à blâmer aujourd’hui chez M. Hamon les choses même qu’elle y applaudissait autrefois. Pourquoi cela ? Je cherche la raison de cette évolution étrange, et ne puis la trouver que dans le nombre même des œuvres que M. Hamon a portées au Salon de cette année. Que ne s’est-il borné à une ou deux toiles ! elles eussent été acceptées sans conteste.

Mais qu’importe à l’art, et que m’importe à moi, son humble desservant, les revirements de la critique ? Je suis de ceux qui préfèrent le moderne à l’antique, la réalité à la fantaisie, l’action à l’allégorie ; je n’ai jamais beaucoup aimé les réminiscences étrusques. M. Hamon n’a pas, il est vrai, que ces réminiscences. Il a la naïveté, la fraîcheur, et la grâce ; il a la piété de l’enfance et sait l’exprimer avec charme et ingénuité. C’est là ce que j’aime en lui. De plus, on m’a dit que dans sa jeunesse, la faim l’a plus d’une fois mordu aux entrailles ; que tout petit, il errait, pieds nus, sur les rudes chemins de ! a Bretagne. J’estime l’homme de n’avoir rapporté ni amertume ni haine de ce dur voyage au pays de la misère ; je respecte l’artiste qui, ayant tant souffert, est resté simple et bon, et continue à chercher la poésie dans les êtres frêles et les choses gracieuses, dans les enfants et dans les fleurs.