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un de ses mulets jusqu’à Savignan, il me repondit que j’en étois le maitre ; mais que je ferois bien à ne le monter que hors de la ville en passant la porte à pieds comme si j’etois un d’entr’eux.

C’étoit ce que je voulois. Petrone ne m’a quité qu’à la porte, où il reçut une bonne marque de ma reconnoissance. Ma sortie de Rimini fut aussi heureuse que mon entrée. J’ai quité les muletiers à Savignan, où après avoir dormi quatre heures j’ai pris la poste jusqu’à Bologne allant me loger dans une mauvaise auberge.

Dans cette ville je n’ai eu besoin que d’un jour pour voir qu’il me seroit impossible d’avoir un passeport. On me disoit que je n’en avois pas besoin, et on avoit raison ; mais je savois que j’en avois besoin. J’ai pris le parti d’ecrire à l’officier françois qui m’avoit fait politesses le second jour qu’on m’a mis aux arrets de s’informer à la secretererie de guerre si mon passeport etoit arrivé, et s’il l’étoit de me l’envoyer, le priant en attendant de s’informer qui étoit le maitre du cheval que j’avois enlevé, trouvant tres juste de le lui payer. En tout cas, je me suis determiné d’attendre Therese à Bologne, et je lui ai fait part de ma resolution dans le meme jour, la priant de ne me laisser jamais sans ses lettres.

Après avoir mis à la poste ces deux lettres, le lecteur verra ce que je me suis determiné de faire dans le meme jour.

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