ses États, sachant, par une vieille prophétie recueillie de ses aïeux, que cette découverte marquerait pour son peuple la fin de ses traditions et de son indépendance.
Aujourd’hui je viens de parcourir en auto l’ancien territoire de Lo-Bengula qui correspond à un des districts actuels de la « South-Rhodesia ». Les « native » que j’y ai rencontrés m’ont paru être d’humeur pacifique et presque débonnaire. Quelques-uns poussaient des charrues traînées par douze ou quatorze bœufs aux cornes majestueuses. D’autres conduisaient des blancs dans de petites carrioles à deux roues. D’autres abattaient le bois dans des forêts clairsemées. Nous n’avons pas aperçu de lions, à peine quelques antilopes, quelques singes et une bande d’autruches, parmi lesquelles notre " motor-car " est venue jeter un tel désarroi que l’un de ces volatiles hauts sur pattes exécuta dans sa fuite précipitée le plus complet et le plus amusant des cumulets. On a conservé l’arbre « indada », sous lequel les rois indigènes rendaient naguère la justice, comme le faisait saint Louis sous le chêne de Vincennes. Mais tout ce passé, encore qu’il ne remonte qu’à une trentaine d’années, semble à peu près aussi lointain pour la population de Buluwayo, — ville du type américain, aux rues larges et aux magasins bien fournis, — que les souvenirs du moyen âge peuvent l’être pour les Européens du XIXe siècle.
Toutefois, dans la région des Matopos, qui sont une chaîne de collines sauvages, commençant à quelque 50 kilomètres de Buluwayo, on va voir encore les clairières où se poursuivirent les palabres entre les chefs indigènes et Cecil Rhodes. Le Napoléon du