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mes vacances au congo

bres qui forment la barre horizontale du T sont occupées, paraît-il, par un agent de l’administration française des Domaines, à laquelle l’Angleterre a cédé, en 1857, cette demeure historique, et comme ce fonctionnaire, qui détient les clefs, n’est pas à Longwood en ce moment, nous sommes réduits à constater que le conservateur, comme tous les conservateurs, conserve jalousement son bien.

L’ancienne salle de billard et l’ancienne chambre à coucher sont entièrement démeublées. Toutefois, à l’endroit même où l’Empereur a rendu son dernier souffle, son buste en marbre, exécuté d’après un moulage qui fut pris aussitôt après son décès, occupe, entre les deux fenêtres, la place du lit mortuaire.

Dans ces chambres froides et démeublées, l’imagination doit faire effort pour reconstituer les récits et les tableaux consacrés au dernier exil et à la mort de l’Aigle. Pourtant, malgré moi un souvenir me vient à l’esprit : c’est celui d’une représentation dramatique à laquelle, lorsque j’étais enfant, il me fut donné d’assister, en un théâtre de patronage, au bon pays de Dinant. La scène représentait les derniers moments de Napoléon. L’Empereur, sentant sa fin approcher, avait réuni autour de son lit d’agonie ses quelques fidèles et leur faisait ses suprêmes recommandations. Alors, brusquement, se soulevant sur ses oreillers et s’adressant au maréchal Bertrand avec le plus savoureux des accents wallons : « Allons ! Bertrand, ouvre-moi donc la fenêtre que j’voie encore un coup la France ! » Telle était, d’ailleurs, la bonne volonté des acteurs et des spectateurs que ces paroles étaient aussitôt couvertes de