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moralement abandonnés et que, par son autorité et sous sa surveillance, ils fussent confiés à une institution « ad hoc », de préférence à une colonie agricole.

À tenter de faire de ces jeunes vauriens des clercs, des mécaniciens, des menuisiers, des maçons, on s’exposerait, en effet, à les renvoyer plus tard dans ces milieux urbains où ils auraient vite fait de se contaminer à nouveau et de grossir le " mob " qui constitue, dès aujourd’hui, un danger pour une ville aussi florissante que Kinshasa.

Autre phénomène de croissance urbaine trop rapide, c’est l’insuffisance de l’hôpital pour les noirs. Faute de place dans les salles, des malades logent sous la tente. Des cas, qui justifieraient l’isolement, y sont traités en régime commun. Je n’oublierai pas de si tôt les cris déchirants poussés à notre approche par une jeune négresse brusquement frappée de folie, m’a-t-on dit, parce qu’un « blanc » lui a repris un enfant qu’il avait eu d’elle. Comme son accès tournait à la fureur, il fallut l’attacher à un arbre, dans la cour, au milieu des autres malades.

À tous les problèmes dus aux circonstances économiques s’ajoutent ceux que fait naître le déplacement prochain de la capitale. Léo est à près de sept kilomètres en aval de Kin. C’est entre les deux villes, à la pointe de Kalina, que le gouvernement général établira bientôt ses quartiers. Jolie matière à études et à plans d’ensemble pour nos « urbanistes coloniaux ». Puisse-t-il se révéler parmi eux quelque maître comparable à ce Baker dont nous avons admiré les travaux à Prétoria, et que le gouvernement britannique vient de charger de la création des nouveaux quartiers de Delhi, promu au rang de capitale des Indes.