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les femmes écrivains de la france

nous, que l’ascendant d’un caractère dominateur, joint à celui de vingt années de plus que moi, rendait de trop l’une de ces deux supériorités. Si nous vivions dans la solitude, j’avais des heures quelquefois pénibles à passer ; si nous allions dans le monde, j’y étais aimée de gens dont je m’aperçois que quelques-uns pourraient me toucher. Je me plongeai dans le travail de mon mari : autre excès qui eut son inconvénient ; je l’habituai à ne savoir se passer de moi pour rien au monde ni dans un seul instant… Mariée, — dit-elle encore, — dans tout le sérieux de la raison, je ne trouvai rien qui m’en tirât. À force de ne considérer que la félicité de mon partner, je m’aperçus qu’il manquait quelque chose à la mienne. »

La première année du mariage se passa à Paris. Roland fut alors nommé inspecteur des manufactures à Amiens, et Mme Roland y devint mère. Elle ne quittait guère le cabinet, si ce n’est pour des promenades hors de la ville, où elle fit un herbier des plantes de la Picardie. En 1784, elle obtint la translation de son mari dans ce qu’on appelait la Généralité de Lyon, où