Page:Carton - Histoire des femmes ecrivains de la France.djvu/126

Cette page a été validée par deux contributeurs.
114
les femmes écrivains de la france

laquelle elle doit sa gloire. C’est dès lors que se révèle cette originalité puissante qui consiste justement dans un mélange de dons familiers qui n’ont rien d’un auteur et qui sont précisément les dons d’une nature supérieure se prodiguant sans effort. Elle ne raisonne pas, elle raconte, elle peint, elle cause dans ses lettres, chronique légère de la cour et de la ville, tracée chaque jour d’une plume qui s’en va la bride sur le cou ; et tout cela avec ses vivacités, ses abandons, ses négligences familières, ses hardiesses et quelquefois ses libertés de tout genre.

Mme de Sévigné continua de vivre à la Cour, se contentant d’aller passer de temps en temps une saison en Bretagne, au Château des Rochers. Elle a rendu immortel ce vieux manoir féodal, entouré de bois séculaires, que ses lettres font connaître de la manière la plus exacte et où sa solitude n’était guère troublée que par les visites de ses voisins, gentilshommes campagnards qu’elle ne pouvait voir sans rire et dont elle s’est souvent moquée avec plus d’esprit que de charité.

Mais elle se plaisait surtout à Versailles où la moindre attention du Roi la comblait d’aise. C’est