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L’ÉDUCATION PAR LES FLEURS.

a couru tout le jour et qu’elle rentre bien fatiguée ?

— Ça m’est bien égal, à moi !

— Mais tu ne les aimes donc pas ?

— Moi, je n’aime personne ! s’écria l’enfant avec une énergie sauvage ; je n’aime personne, parce que personne ne m’aime. »

Louise, effrayée, quitta Gote ; elle revint chez elle, encore tout émue, raconter cette petite scène à sa mère ; puis elle resta plusieurs jours sans retourner à la cabane. Mme Malmont, qui l’observait, craignait qu’elle n’eût pas le courage d’apprivoiser cette enfant si farouche ; l’entreprise était difficile, et il n’y avait que l’affection qui pût la rendre douce. Louise commençait à s’intéresser à Gote et même à l’aimer un peu ; elle la trouvait si malheureuse ! Se sentant mal à l’aise de ne la plus voir, elle fit un bouquet de belles primevères et le lui porta en lui disant d’un ton caressant et presque craintif :

« Gote, tu vois bien que moi je t’aime, puisque je t’apporte des bouquets ! »

Gote fut toute remuée par ces douces paroles ; elle répondit :

« Pourquoi donc alors n’êtes-vous pas venue depuis trois jours ?

— C’est que tu m’avais fait peur, vois-tu, Gote ! »

Elles entrèrent ensemble dans la chaumière, et il