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CAPITAINES DE LA VILLE.

mais, à l’époque dont il est ici question, ces personnages ne s’étonnaient point de recevoir des ordres de la Communauté. La confusion des pouvoirs était partout, et, si le gouverneur et le Parlement entreprenaient parfois d’empiéter sur le domaine purement municipal, la Communauté, de son côté, sortait volontiers du cercle d’attributions où l’on serait disposé, de nos jours, à enfermer un corps municipal. La Communauté n’oubliait pas qu’elle nommait les capitaines de la ville[1], que devant le gouverneur, et, en son absence, devant son lieutenant ou ses connétables, ils étaient tenus de lui prêter serment avant d’entrer en fonctions ; elle les considérait si bien comme placés sous sa dépendance qu’à son gré elle les appelait en la Maison de Ville ou leur en refusait l’entrée ; quand ils paraissaient dans la salle où elle délibérait, elle les reléguait derrière son bureau ; si elle les autorisait à prendre part à ses votes, leur opinion devait être émise collectivement et ne comptait que pour une voix[2]. On peut déjà trouver extraordinaire qu’elle ait songé à se servir d’eux pour surveiller la répartition d’un emprunt forcé entre les différents quartiers de la ville[3] ; mais, il est encore plus surprenant qu’elle leur ait commandé de rassembler ceux des habitants qu’ils avaient sous leurs ordres, pour se présenter en armes devant le gouverneur de la province[4]. Si le gouverneur de la ville était absent, son lieutenant aurait dû suffire pour convoquer de lui-même la milice urbaine ; la Communauté eût pu tout au moins l’inviter à agir sans passer par-dessus sa tête pour faire connaître ses volontés aux simples capitaines. Lorsque le Roi entra dans Rennes en 1598, la Communauté donna des ordres précis à la milice. Elle décida que les bourgeois iraient au-devant du Roi, à cheval, à la suite de leurs connétables[5]; elle spécifia que chacun d’eux serait « en bon équipage » et avec de

  1. Bibliothèque de Rennes, ms. 320, fo 70.
  2. Ibid., fo 71.
  3. Archives de Rennes, 136 (1er janvier 1591).
  4. Ibid., 478 B, fo 61 ro (13 août 1608).
  5. Ibid., 475 A, fo 40 vo (29 avril 1598).