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beau. Nostre journée fut d’unze lieues, elle fut aussi très belle[1].

Le septe. juin, il fist un gros vent qui n’empescha pas la traversée du lac que nous fimes, qui a une lieue de large en cet endroit. Nous fimes pareillement deux portages, pour traverser une pointe du même lac (430 bis), et racourcir notre chemin. Ces deux portages dont le premier est de soixante pas, et l’autre, de deux cents, sont causés par un petit lac qui se trouve au milieu de la traversée de cette pointe, dont les eaux sont extrement cleres. Nous fîmes encore cette journée une autre traversée de deux lieues, pour aller gaigner l’embourchure de la rivière[2] qui descend aux Anglois, ou nous fumes camper.

Le huittie. il fist beau temps et nostre journée fut de quinze lieues, dans lesquelles nous trouvâmes quatre portages et plusieurs rapides qu’il faillut sauter[3].

  1. Bonne journée aussi ! Les intrépides voyageurs avaient traversé presque tout le lac Abitibi, dans une course fort rapide.
  2. La rivière Abitibi, qui se jette dans la baie James, après une course de 240 milles.
  3. Longue course quand on considère les portages difficiles qui se rencontrent dans ce parcours de quinze lieues. Deux surtout méritent d’être mentionnés ici ; c’est d’abord celui des chutes Couchiching, à sept milles de l’embouchure de la rivière. C’est là que se trouve le grand barrage emmagasinant les eaux qui fournissent l’énergie motrice aux moulins de « l’Abitibi Pulp and Paper Company ».

    Le deuxième de ces portages est celui des Chutes-aux-Iroquois. C’est en cet endroit que sont construits les moulins de l’« Abitibi Pulp and Paper Company ». Un village s’est formé tout autour, et ce pays perd, peu à peu, sa sauvage beauté d’autrefois. Mais pourquoi cette chute a-t-elle emprunté son nom aux Iroquois ?

    « Du temps, nous dit l’abbé J.-B. Proulx (À la baie d’Hudson, 1886, pp. 62-63), que les terribles guerriers des Cinq-Cantons faisaient la chasse, non pas aux bêtes, mais aux hommes, jusqu’aux confins les plus reculés de l’Amérique, ils surprirent, sur le lac Abitibi, un parti de sauvages de cette contrée. Les hommes furent scalpés et brûlés à petit feu, les femmes égorgées, les enfants empalés comme des lapins au bout de pieux durcis au feu, puis rôtis et mangés. Seule, une femme fut épargnée afin de servir de guide aux vainqueurs dans la poursuite