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aiant beu vouloient se tuer. J’y envoié sur le champ le sieur de la Noue avec cinq hommes qui mirent le hola, et osterent le fusil du plus mutin, qui en couchoit un autre en joüe. Je leur osté, à mon tour, à leur arrivée au camp, le reste de leur eau de vie, pour les punir, et leur donné a la place de chaque baril un sac de bled d’inde, avec deffences d’y toucher. Le sr. d’hybervile fut chercher les deux canots rompus, qu’il remist comme il pust en estat de servir.

Mais le temps qu’il y faillut mettre joint au vent effroiable et au froid rigoureux qu’il fist le lendemain 13e., m’empescha de me mettre en chemin avec mes gens, dont quelques-uns se promenant, trouverent dans le bois deux peaux d’orignal, qu’aparament quelques sauvages avoient cachées, en chassant, qu’ils apporterent au camp pour vendre, de quoy estant adverti, je les fis reporter au même endroit, et envoié le sr. de ste. helenne pour avoir l’œil à ce que cela fust exécuté (414).

Le quatorziesme, jour de Paques, nous fimes nos dévotions a une grande messe que l’on chanta avec toute la solennité que le temps et lieu purent permettre[1]. Il fit toute la matinée un fort gros vent de nort, mais l’apres midi le temps fut assez beau. Apres vêpres, je fis une revue de tout mon detachement, dont je fis trois brigades composés chacunes, de trois escouades. Je pris la premiere pour moi, dont je laissé le commendement au sieur de Chesny

  1. Le chevalier de Troyes et sa petite troupe durent passer ce jour de Pâques dans les environs de Grace-Point, sur la rive nord de la rivière Ottawa.