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des grandes agglomérations d’hommes. Quant aux misères plus graves dont vous avez peut-être entendu parler, elles arrivèrent dans des temps assez rapprochés de nous, lorsque les Forges cessant leurs opérations, laissaient la population inactive ou insuffisamment occupée. Le travail est moralisateur, mais l’oisiveté engendre tous les vices.

À chaque heure du jour, les cris des charretiers qui amenaient la mine ou le charbon, les coups du gros marteau qui ébranlaient le village tout entier annonçaient une vie singulièrement active et laborieuse, mais d’un autre côté, les personnages de distinction qui arrivaient à la Grande Maison en beaux équipages donnaient une idée de la vie plus libre et plus brillante de la Noblesse.

Telles étaient les Forges Saint-Maurice autrefois.

Tant que la Colonie resta sous la domination de la France, la population des Forges jouit d’un avantage qui contribua beaucoup à la conserver chrétienne et heureuse : elle eut les services d’un prêtre résidant au milieu d’elle.

Dès l’année 1740, il existait une chapelle aux Forges Saint-Maurice. Cette chapelle n’était pas somptueuse, elle était en bois rond, d’après M. Benjamin Sulte ; mais enfin le peuple pouvait s’y assembler pour entendre les saints offices et les prédications. On y ajouta une sacristie en pierre, de vingt pieds sur vingt, que l’on voyait encore en 1860, et dont on trouve les fondations en bêchant le sol. Cette sacristie qui servait peut-être de presbytère aux pères Récollets, se trouvait vis-à-vis l’aile de la Grande Maison, à l’endroit que l’on appelle aujourd’hui le petit jardin. La chapelle était plus au nord-ouest, et le cimetière s’étendait le long du Saint-Maurice, à l’endroit où l’on a vu naguère les carrés d’un vaste jardin, aujourd’hui en friche. Un enfant de S. François, un père récollet, fut chargé de cette modeste desserte, et le roi de France étant devenu propriétaire des Forges, payait lui-même l’entretien de ce bon religieux. Or voici l’ordre dans lequel se succédèrent les pères récollets :