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fantaisies, les passions irréparables. Henri Heine, qui l’a vue souvent à la fin de cette période (de 1833 à 1840), nous a laissé d’elle un vif portrait, qui doit être ressemblant : « son visage peut être nommé plutôt beau qu’intéressant, disait-il ; la coupe de ses traits n’est cependant pas d’une sévérité antique, mais adoucie par la sentimentalité moderne, qui répand sur eux comme un voile de tristesse. Son front n’est pas haut, et sa riche chevelure du plus beau châtain tombe des deux côtés de la tête jusque sur ses épaules. Ses yeux sont un peu ternes, doux et tranquilles. Elle n’a pas un nez aquilin et émancipé, ni un spirituel petit nez camus. Son nez est simplement un nez droit et ordinaire. Autour de sa bouche se joue habituellement un sourire plein de bonhomie, mais qui n’est pas très attrayant ; sa lèvre inférieure, quelque peu pendante, semble révéler une certaine fatigue. Son menton est charnu, mais de très belle forme. Aussi ses épaules, qui sont magnifiques… Sa voix est mate et voilée, sans aucun timbre sonore, mais douce et agréable… Elle brille peu par sa conversation. Elle n’a absolument rien de l’esprit pétillant des Françaises ses compatriotes, mais rien non plus de leur babil intarissable. Avec un sourire aimable et parfois singulier, elle écoute quand d’autres parlent, comme si elle cherchait à absorber en elle-même les meilleures de vos paroles… Cette particularité est un trait sur lequel M. de Musset appela un jour mon attention. « Elle a par là un grand avantage sur nous autres », me