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CHAPITRE XL.

DE LA CIRCULATION.

§ 1. — La division de la terre est une conséquence de l’accroissement du pouvoir de combinaison parmi les hommes.

Tout en possédant beaucoup de terre, notre colon des premiers âges ne possédait pas la richesse — n’ayant aucunement de ce capital matériel et fort peu de ce capital intellectuel indispensables pour appliquer à son service les forces de la nature. Elle était puissante pour résister à ses efforts et il était faible. Ce qui le tenait, pour pourvoir à sa subsistance, dans la dépendance complète de sa libéralité envers lui. Monarque de tout ce qu’il avait sous les yeux, il demeurait esclave d’elle, dénué qu’il était du pouvoir qui résulte de la combinaison avec d’autres de ses semblables. Plus son territoire était grand, moindre était nécessairement le pouvoir d’association, et plus grands étaient les obstacles à ce qu’il pût acquérir la richesse et le pouvoir.

Un jour enfin il découvre qu’il a un voisin, il reconnaît que sa femme et lui ne sont pas les seuls occupants, qu’il n’est pas l’unique propriétaire — il ne possède que la moitié. Voilà ses possessions diminuées. Est-il, lui ou son voisin, plus pauvre qu’auparavant ? Au contraire, ils sont plus riches tous les deux — ils ont gagné l’accroissement du pouvoir résultant de l’aptitude à combiner leurs efforts pour vaincre la résistance qui jusqu’ici s’était montrée supérieure à leurs efforts isolés. Chacun d’eux tire profit des qualités distinctives de l’autre. L’un excelle à prendre le poisson, l’autre à prendre les oiseaux ou les lapins, les voici tous deux à même de se procurer une nourriture plus abondante.