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contrée, les Français furent initiés au secret de sa prospérité. Ils s’appliquèrent à transporter chez eux la culture du mûrier, l’élève du ver à soie et les fabriques de soieries. Cependant, tout progrès dans cette voie fut suspendu sous les derniers règnes des derniers Valois, et la France s’approvisionna de son luxe exclusivement chez les fabricants italiens et flamands. L’industrie française dut attendre l’apparition de Sully et de Henri IV pour obtenir la protection royale et l’assistance dont elle avait tant besoin. »

Selon l’opinion de M. J.-S. Mill, a souvent la supériorité d’un pays sur l’autre, dans une branche d’industrie, tient tout simplement à ce que le premier a commencé plus tôt. Il se peut qu’il n’y ait aucun avantage naturel d’un côté, aucun désavantage de l’autre, mais seulement une supériorité actuelle d’habileté et d’expérience. Un pays qui a cette habileté, mais qui manque d’expérience, peut, sous d’autres rapports, être mieux placé pour la production que le pays qui a commencé le premier. On a remarqué aussi que, dans toute branche de production, rien n’encourage mieux le progrès qu’un changement dans les conditions où elle se développe. Mais on ne peut pas s’attendre à ce que des particuliers introduisent à leurs risques, ou plutôt avec la certitude de perdre, une nouvelle industrie dans un pays, et supportent les charges auxquelles il faut se soumettre pour la soutenir, jusqu’à ce que les producteurs se soient élevés au niveau de ceux qui fabriquent par tradition. Un droit protecteur, maintenu pendant une période de temps raisonnable, est souvent l’impôt le plus convenable qu’une nation puisse établir sur elle-même pour soutenir une expérience de ce genre[1]. »

Ailleurs il dit : que les pays qui ont à la fois « la vie à bon marché et une grande prospérité industrielle sont en petit nombre[2]. » Il aurait pu aller plus loin et affirmer que l’existence de l’une de ces deux choses est incompatible avec l’autre. L’aliment est à bon marché là où, faute d’une classe industrielle, le débouché est plus loin ; les utilités achevées y sont chères. — La combinaison de ces deux phénomènes est le signe d’un faible degré de civilisation; ou les trouve réunis dans tous les pays qui suivent les errements de l’école Ricardo-Malthusienne.

  1. Mill. Principles, liv. V, ch. X.
  2. Ibid., t. I, ch. XIII.