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rappeler que pendant que l’Angleterre a joui d’une paix intérieure pendant plusieurs siècles, l’Europe continentale a été le théâtre de guerres incessantes, et que la condition des hommes et des femmes en Angleterre, était, il y a un siècle, presque infiniment supérieure à celle de leurs voisins du continent, les uns ayant conquis leur liberté, les autres étant à peu près, si ce n’est complètement, esclaves. De plus, l’Angleterre a précédé le continent dans la conquête du pouvoir sur les grandes forces de la nature, — et l’a laissé loin derrière elle. — Il faut, en outre, se bien mettre dans l’esprit que, — comme il y a solidarité d’intérêts entre tous les peuples de la terre, — tout ce qui tend à diminuer chez l’un d’eux le pouvoir de production est nuisible à tous. Si le travail du peuple anglais produisait davantage, les femmes anglaises feraient une plus forte demande des produits du goût et de l’adresse des femmes de France, et si les femmes d’Amérique trouvaient dans la fabrication des étoffes une demande de leur propre travail, elles seraient à même de consommer plus de produits du goût et de l’adresse des femmes de France et d’Angleterre. La protection tend à augmenter la concurrence pour acheter le travail, — et par-là à émanciper à la fois les hommes et les femmes. Le système aurais, partout où on le rencontre, augmente la concurrence pour le vendre, — et, par là, il asservit tous ceux qui ont besoin de le vendre, tant hommes que femmes.

§ 5. — Étonnants contrastes que présente la condition du sexe dans les différentes parties de l’Union américaine. La théorie du gouvernement est favorable à la création des centres locaux et à placer haut le sexe. La pratique qui tend vers la centralisation y est contraire, de là rapide augmentation de criminalité féminine et de prostitution.

Dans cette question comme dans toutes, l’Union américaine est une nation de contrastes. Dans telle partie, nous voyons la femme jouir d’un degré de liberté dont on ne trouve nulle part d’autre exemple, tandis que dans telle autre, les femmes mariées et celles non mariées passent de main en main comme de vrais meubles ; — on les vend à l’encan avec ou sans les pères, les maris, les sœurs, les frères, les enfants. Dans la première partie, on avait eu en vue le commerce, et il y a eu tendance à créer des centres locaux, faciliter l’association, produire le développement des pouvoirs latents de la terre et des hommes et des femmes à qui a été donné l’usage de la terre. Croyant à l’omnipotence du trafic et cherchant à en étendre l’empire, l’autre partie, cependant, s’est mue dans la direction inverse, — il en est résulté l’anéantissement des centres locaux, l’affaiblissement du pouvoir d’association, l’épuisement du sol et la limitation de la demande pour les pouvoirs