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a défendu le travail des femmes dans les mines sons certaines circonstances, et la loi a limité le travail des enfants, — mais le fait lui-même que de telles lois soient devenues nécessaires dénote clairement l’absence de cette concurrence pour l’achat du travail, qui permettrait au travailleur d’obtenir un salaire convenable quotidien pour une journée d’un travail raisonnable. « La boutique de dévastation où les femmes sont obligées de travailler de 16 à 20 heures par jour, sous une température qui dépasse celle de la zone torride, — la boutique où l’on dépense leur vie comme celle du bétail sur une ferme, » continue d’exister ; et toute tentative d’intervenir avec une pensée de protection pour ces femmes sans assistance » rencontre de l’opposition, à cause ce de l’aiguillon de la concurrence » pour la vente des étoffes[1]. Quel est cependant l’objet de cette concurrence ? Celui d’empêcher les femmes de l’Inde, de l’Irlande et de l’Amérique de trouver acheteurs pour leur goût ou leur talent, leur travail, soit physique, soit intellectuel. La femme anglaise est ainsi dégradée à la condition d’un pur instrument pour écraser ses semblables dans le monde entier, — et sa propre pauvreté, son dénuement, son abaissement moral sont alors mis en avant comme preuve à l’appui de la doctrine d’excès

    soir quittez-vous ? — À sept heures et demie. — Vous sentez-vous fatiguée après la journée de travail ? — Je n’ai qu’à tous dire, monsieur, que la besogne est rude, nous avons à soulever plus haut que la tête quatre peignes, par minute, qui pèsent vingt-quatre livres. — C’est-à-dire que vous soulevez quatre-vingt-seize livres par minute, pendant tout le jour. — Oui, monsieur, et cela toute la semaine. C’est pourquoi vous nous voyez ici à boire du thé, car nous n’avons pas grande envie de manger, et il faut prendre quelque chose. J’ai apporté mon beurre et mon pain, ce matin, et vous voyez, je n’y ai pas touché. Votre mari a-t-il de l’ouvrage ? — Voici dix-huit mois qu’il en a manqué. — Se lève-t-il à la même heure que vous ? — Non, je le laisse au lit avec le plus petit de nos enfants. — Combien avez-vous d’enfants ? — Trois ? — De quel âge ? —— Cinq ans, trois ans et un an. Il m’arrive parfois de ne plus voir celui de trois ans du lundi matin au samedi soir y parce qu’on est couché avant que je rentre et que je le laisse au lit le matin à mon départ. — Que vous donne-t-on pour ce genre de travail ? — Nos salaires varient de six à huit shillings par semaine. — Depuis quel, temps travaillez-vous en fabrique ? — Depuis que j’ai eu mon second enfant. — Combien êtes-vous de femmes dans votre fabrique ? — Trente. — Combien de mariées ? — Dix. — Combien ont eu des enfants ? — Presque toutes ; et celles qui en ont ne veulent pas rester ici longtemps, car ce sont de mauvaises places. Je voudrais bien n’en jamais avoir entendu parler, pour le bien de mes enfants. Je puis vous assurer, monsieur, que j’ai connu des jour meilleurs. » — Wrongs of Women, p. 134.

  1. Voyez précéd., vol. I, p. 544.