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subsistances, fonctionne incessamment et dont se faire saisir sous une quelconque des diverses formes de misère à une partie considérable de l’humanité[1]. L’homme entre dans le monde en esclave de la nature ; il y doit rester esclave de ses semblables, n’ayant aucun droit à la moindre part des subsistances, et en fait n’ayant point de tâche à remplir là où il se trouve, si la société n’a pas besoin de son travail. « Au banquet de la nature il n’y a point de place pour lui. Elle lui dit de s’en aller et il doit vite obéir[2]. » Il s’informe s’il n’y a pas d’espoir de salut pour sa femme et ses enfants on pour lui-même ; on lui affirme l’existence de certaines lois positives et immuables fonctionnant d’une manière si absolue que « la masse entière de subsistances aujourd’hui produites aurait beau être portée au décuple par les efforts de l’esprit d’invention et de l’industrie humaine ; » on peut émettre cette assertion, a comme vérité indubitable que l’unique résultat serait, après quelques années écoulées, la multiplication dans la même proportion du nombre d’habitants, et probablement en même temps la pauvreté et le crime accrus dans une proportion bien plus considérable[3]. »

En vertu du grand principe de population, il y a et il y aura toujours tendance au peuplement d’un pays, « jusqu’à la limite des subsistances, — cette limite étant le minimum nécessaire pour entretenir une population stationnaire[4]. » Avec une telle perspective, pourquoi l’homme hésiterait-il à s’abreuver à la seule source de plaisir qui coule pour lui, — la satisfaction de ses appétits animaux[5]. ?

  1. Principles of Population, liv. I, ch. i.
  2. Ibid., seconde édit., p. 431.
      M. Malthus, par déférence pour l’opinion publique, a depuis supprimé ce passage, et pourtant, en l’écrivant, il n’avait fait que pousser jusqu’au bout « son principe. » Les écrivains qui Tout suivi sont allés aussi loin que lui, et ils ont écrit ce que nous citons.
  3. Cité par M. Rickards, dans son livre Population and Capital, sans nom d’auteur. M. R. est, comme nous, opposé à la théorie de Malthus ; ce qu’il a fourni, tant en faits qu’en raisonnements, mérite l’attention du lecteur.
  4. Principles of Population, liv. III, ch. iv.
  5. « Un pauvre diable famélique, qui n’a que des haillons pour se couvrir, une hutte de terre pour y dormir, sait qu’il ne peut être méprisé davantage, bien qu’on puisse avoir pour lui plus de pitié, si les trous dans ses joues, et dans son vêtement, et dans le toit de son abri, viennent à s’agrandir du double. L’absence de honte, au sujet de son apparence extérieure, n’est pas non plus suppléée, comme on pourrait s’y attendre, par la crainte accrue des maux encore plus réels de la misère. Au