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Dans l’Union, cette nécessité s’accroît — par suite de ce que le pouvoir d’association tend constamment à diminuer. De là vient que l’histoire des quelques dernières années présente une marche vers la croyance que l’esclavage de l’homme est d’origine divine, et vers la démoralisation du peuple et de l’État[1].

§ 5. — L’erreur dans une société tend à produire l’erreur dans toutes. Les guerres de l’Angleterre contre les manufactures des autres nations, tendent à produire l’esclavage au dehors et chez elle. Émigration extraordinaire des îles anglaises.

En vertu de l’harmonie parfaite de tous les intérêts réels et durables de l’humanité, l’erreur introduite dans une société engendre Terreur partout ; nous avons la preuve complète que c’est ici le cas, dans ce que nous voyons se produire aujourd’hui au grand centre de ce système funeste. La ruine, en Irlande, du pouvoir d’association tendait à forcer l’émigration d’Irlandais en Angleterre, — et par suite, à avilir le prix du travail » au grand désavantage du travailleur anglais[2].

  1. J’ai été fort étonné de ce que personne, avant ceci, n’avait rendu un compte fiđèle de la condition du peuple et de l’état de choses en Californie. J’ai séjourné dans cet État trois mois, et, dans ce laps de temps, j’ai vu plus de misère, plus de vice, plus d’immoralité, plus d’espérances ruinées et plus d’amers désappointements, plus de complète infortune et plus d’impuissants regrets que je n’en avais vus dans tout le cours de ma vie. C’est une chose à étonner, à confondre, que quelque philanthrope n’ait pas entrepris la tâche d’exposer aux yeux du monde l’état des affaires ici, et le sort à peu près universel de la grande majorité des émigrants en Californie. Tous ceux qui quittent leur pays pour cette terre, qu’on suppose la terre de l’or, partent avec de hautes espérances, des attentes brillantes ; mais s’ils savaient quel sort à peu près certain les attend ici, ils aimeraient mieux biner les pommes de terre à cinquante cents par jour, que d’entreprendre cette expédition. Ceci serait également applicable à cette foule de gens qui se trouvent forcés d’aller gagner les États sur la frontière. — Voyez précéd. vol. II. p. 267, note.
  2. « Des nuées d’Irlandais misérables assombrissent toutes nos villes. Les traits du sauvage Milésien, empreints d’une fausse ingénuité, d’insouciance, de déraison, de misère et de raillerie, vous saluent sur toutes les routes, à tous les carrefours. Le cocher anglais, tout en passant comme un tourbillon, allonge au Milésien un coup de fouet et une malédiction de la langue, le Milésien ôte son chapeau pour demander l’aumône. Il est le plus grand fléau contre lequel notre pays ait à lutter. Dans ses haillons et sa rieuse sauvagerie, il est ici pour entreprendre tout travail qui se fasse à bras ou à dos, moyennant un salaire qui puisse lui acheter des pommes de terre ; il ne lui faut d’autre assaisonnement que du sel. Il loge, à son caprice, dans un pigeonnier, dans un chenil, se juche sous un hangar, et porte une série de haillons, dont se dépouiller est, dit-on, une opération difficile qu’il n’accomplit que les jours de fête et de hautes marées inscrits au calendrier… L’homme saxon, s’il n’accepte pas de travailler au même prix, ne trouve pas d’ouvrage. Et pourtant ces pauvres Calédoniens, que peuvent-ils à cela ? Ils ne peuvent rester au pays et y mourir de faim. Il est juste et naturel qu’ils viennent ici, comme une malédiction pour nous. Hélas ! pour eux aussi, ce n’est point là un luxe. Le jour est venu où la population d’Irlande doit obtenir quelque amélioration ou bien être exterminée… Il suffit de regarder au bout de son nez avec les lunettes de la statistique, pour voir qu’à la